Si, de nos jours, le débat autour de la valeur faciale de la roupie refait surface par intermittence, soit que le secteur privé se sent désavantagé par rapport à une roupie qui ne se déprécie pas comme souhaité ou par le Gouverneur de la Banque centrale qui affiche qu’il faut préserver la valeur de la roupie, les nostalgiques se souviendront quand même que trente ans de cela, vers la fin de 1981, on dévaluait la roupie mauricienne de 20% ; la deuxième dévaluation en deux ans.
En 1979, la roupie glissa pour la première fois de son histoire de 30% par rapport à une économie qui s’essoufflait après le boom sucrier de 1974. Sir Veerasamy Ringadoo, alors ministre des Finances eut à prononcer cette douloureuse décision dans un direct télévisé. Deux ans plus tard, ce fut une deuxième glissade de la roupie qui la situa à une vraie valeur faciale de 50 sous, vu que cette dévaluation n’incluait pas alors les effets internes ou externes de notre économie, encore « primitive » à l’époque.
Les facteurs favorisant cette dévaluation
La deuxième dévaluation de la roupie eut lieu principalement à cause de l’effritement du pouvoir d’achat de la population avec une montée en flèche des matières premières importées à l’époque. Déjà, le gouvernement sous son État providence offrait des subsides sur les denrées de base que le pays importait. Ajoutons à cela, une situation économique fondée uniquement sur l’exportation du sucre au Marché Commun qui, toutefois, garantissait un prix relativement favorable pour notre seul produit exportable.
Une autre raison favorisant cette dépréciation était la montée en flèche du syndicalisme ouvrier et des mouvements de gauche. Si ces mouvements-là s’illustraient de par une revendication des droits des travailleurs, ils eurent également une influence sur la productivité. Dans un milieu un peu trop libéral des années 70, il y eut la grande grève de 1979 suivie d’un ralentissement quasi-total des activités portuaires, et de pénurie de durée indéterminable. Ces effets furent néfastes pour le pays au niveau économique bien que, par la neutralité de notre analyse, on peut en tirer des leçons quant à la démocratisation des premiers « collective bargainings » de l’histoire post-indépendante.
Un troisième facteur important fut le manque de diversification. A l’époque, le ministre de l’Agriculture, feu Sir Satcam Boolell, fut l’un des seuls à avoir la clé de notre panne économique. Il fut l’un des premiers à évoquer la diversification agricole pour permettre à l’économie de décoller. Sachons qu’en 1981, l’on comptait aussi d’autres secteurs porteurs dont l’industrie du thé avec une qualité « export » qu’enviaient des Sud-Africains ; un secteur touristique où les hôtels pouvaient être localisés sur une carte « Atlas » utilisée par les élèves du CPE, fraîchement introduit à l’issue des classes boursières connues comme le « Junior Scholarship ».
La parité de Bretton Woods
La dévaluation de la roupie mauricienne fut appliquée sans tenir compte des effets internes comme l’inflation, les technicités de la demande et de l’offre ou encore les dépréciations occasionnelles. Également, les facteurs exogènes comme la compétition, l’accroissement de la demande extérieure ou encore la dette extérieure ne furent pas tellement pris en considération.
Cela dit, la dévaluation dépendit de la parité de Bretton Woods, bien que le système fut mis à l’écart dès 1971. En effet, les anciennes colonies britanniques continuèrent à adopter le système de parité. Ainsi, la valeur faciale de la roupie équivalait à cinquante sous en 1981 donnant ainsi à la roupie indienne, une rare occasion de devancer la roupie mauricienne. Cela eut un effet immédiat sur les étudiants mauriciens postés soit à Chandigarh ou à Delhi. Pire encore, le livre sterling prenait son envol, et aller étudier en Grande Bretagne avec ou sans le soutien des parents et des collectivités rurales, « baitkas », ou urbaines « Welfare Associations », etc. n’était permis qu’aux seuls fortunés. Certains commencèrent à se tourner vers la France compte tenu du système éducatif gratuit.
Quels effets sur la société ?
Bien qu’une dévaluation soit une mesure préventive, souvent préconisée par le Fonds monétaire international aux pays endettés, elle reste comme un couteau dans la plaie. Grâce à une telle mesure néanmoins, certains pays ont pu faire un bond économique comme l’Argentine, endettée de 2002 à 2007. Toutefois, les économies fragiles tombent souvent en ruine.
Les indicateurs économiques de 1981 étaient dans le rouge. Déficit économique très lourd à porter ; fardeau des ménages absolument dur à soulever ; répartition inéquitable de la richesse ; et surtout, une importation de matières premières et des denrées pour survivre qui creuse très aisément le trou budgétaire.
Par conséquent, au lieu d’alléger un fardeau économique ou encore de corriger nos erreurs dues à une grève perlée sans précédent, le pays sera dans le rouge, et ce fut l’appel hâtif (ou retardé) aux urnes.
Soyons clairvoyants !
L’auteur de ces lignes ne fait qu’un constat économique dans un contexte historique et non politique. La dévaluation de 1981 – considérée comme l’ultime dévaluation – permit aux nouveaux gouvernants de réfléchir d’une façon plus corroborée. En 1983, le ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo, parla d’une refonte de notre système monétaire en passant de la parité fixe à un mouvement plus flexible de la roupie en optant pour le « Special Withdrawal Rights ». Au fil des années, le système monétaire opta pour une dépréciation plus souple, mais soutenue, tout en gardant en tête la confiance des importateurs et exportateurs.
Par ailleurs, le ministre de l’Agriculture de l’époque, Madan Dulloo, évoqua une première décentralisation de l’industrie sucrière alors que Kishore Deerpalsingh, autre ministre, eut auparavant à faire estomper la deuxième industrie du pays, le thé, pour convertir ces terres non rentables du Plateau Central, en terre cultivable pour la canne.
Dévaluation déguisée
Si la dévaluation ne fut pas de nouveau discutée, tel fut le cas pour la dépréciation. De Rs 11.40, en parité avec le livre sterling en 1971 (fin du système Bretton Woods), la roupie se situa à Rs 70, en 2005 pour être rééquilibrée à Rs 50. Nombre de penseurs économiques diront que la dépréciation offre un « breathing space » aux investisseurs, et certains parlent même de dévaluation déguisée.
Avec le temps, la roupie s’est effritée même si, de nos jours, on parle, selon ses convictions, de stabilité ou encore de l’appréciation de notre roupie.
Des terrains vendus à quelques centaines de roupies la perche en 1981 à des immeubles allant jusqu'à cinquante millions de roupies de nos jours, la couleur de l’argent nous en dit beaucoup. Soulignons que pour garder une économie prospère, ni l’Inde ni la Chine ne font glisser leur monnaie nationale par rapport aux autres.
En passant, l’Inde a eu son économiste « Nobel » Amartya Sen qui évoqua le concept de « Welfare Economics », c'est-à-dire, donner un « breathing space » à la population… L’Inde est entrée dans la cour des grands. Elle l’ambitionnait déjà depuis 1981, si vous m’avez suivi sans perdre le fil conducteur !
Monday, November 7, 2011
1981 – 2E DÉVALUATION: La roupie en mémoire
THE TENTH YEAR COMMEMORATION: 9/11 Where Africa stands
The tenth year commemoration of September 11 attacks in Lower Manhattan, New York city, USA, sheds light on the frailty of security systems not only in the most powerful nation of the world but equally in any part of the planet. The terrorist attack was the most followed live broadcast all over the world while it explained that the divide between the West and the poor nations had created breeding grounds for terrorism.
Although Al Qaeda was then represented by the rich and powerful Saudi, Osama Bin Laden, it reflected that the opposition to capitalist democracy could be challenged by the threat of terrorism. Instantly, former president George W. Bush announced that America was at war and summoned his troops to invade Afghanistan and Iraq in a double intention to uproot terrorism and oust influential dictator, Saddam Hussein.
Not that autocrats, or more commonly, dictators from the Arab World have been mostly put to silence by a combined effort of Western alliances, the threat of terrorism still appears not to be totally eradicated. Somalia, located at the horn of Africa, exists since a decade under lawless government and, more prominently, stands as the modern hive for pirates who capture vessels sailing through the Indian Ocean for handsome ransoms.
Africa’s position regarding 9/11
George W. Bush ushered that the world had either to be on the side of the USA or be on the terrorists’side. He meant that, apart from civilised Western values of democracy, the world could be fraught with corruption and terrorists. Locating terrorists was not so complex mathematically as these could be directly positioned within Arabian nations and the poorest parts of the developing world.
Apart from Iraq, Gaza and some other Islamic threat points, Africa was plainly stated as the breeding ground for terrorism. Sub-Saharan Africa was targeted as a potential base of malicious threat since mercenaries could be spotted in its undeveloped nations. It was clearly known that Sub-Saharan Africa was fraught with abject poverty, poor governance and puppet dictators unable to monitor effectively peace and stability.
Some time earlier to 9/11, the Bush administration considered coming to help to African nations under “trade not aid”. The White House was correct in stating that trading with Sub-Saharan Africa would be a new opportunity to get the Dark Continent out of poverty. The most commendable action that took place was the implementation of the African Growth and Opportunity Act (AGOA) which would promote industrial development of Sub-Saharan Africa and boost trade opportunities for a continent that is usually viewed-or neglected-as Rest of the World.
The failure of the African Union
The opportunity to see a better-off Africa, free from corruption and no more dark-listed as terrorist nations, came from Muammar Gaddafi’s plan to re-engineer the African Union (former OAU). Gaddafi, then self-proclaimed as pan-African leader, wanted to provide handsome Libyan funding to its poor neighbours and show that, unlike Al Qaeda, he would set pace for a more peaceful and stable Africa.
The African Union, as a transnational organisation, initially welcomed Gaddafi’s views but surrendered when it considered single-leader dominance as a threat to open debate and independent democracies that Africa was aiming at.
The African time bomb
Trade in Africa, in conformity with the US trade strategy “trade not aid” worked out successfully with more support from the Obama administration as from 2008 onwards coupled with a more sympathetic attitude to Africa. Compared to military invasions in Iraq and Afghanistan, Africa has so far been spared military invasion-exception to the 2011 NATO attacks on Libya.
Far from expecting Africa to progress and burn the roots of terrorism, the Dark Continent has seen its future compromised. Firstly, most of the world’s poorest people live in Sub-Saharan Africa under a mere $1 per day. Secondly, only a fistful of Sub-Saharan African nations-including Mauritius-have performed well while most of the other parts are unstable and economically dependent on foreign aid.
Added to these weaknesses is the high prevalence of HIV-AIDS with a population demography that is rising exponentially in several nations. For instance, Nigeria will be the fourth most populated nation in the world in twenty years’time. Poverty levels will be on the rise and lawless nations will keep rising in numbers. This could be everywhere, stemming from undeveloped areas in Madagascar or Democratic republic of Congo to ethnically-divided nations like Sudan, Niger, Guinée Bissau or Côte D’Ivoire.
Al Qaeda’s terrorist traps
African nations have, henceforth, become important breeding grounds for terrorism. Though Al Qaeda reigned long after 9/11 until its leaders were silenced, its death is still premature to be accounted. This organisation, a radical satellite terrorist army, claims itself to be the defender of Islam while clerics in the Muslim world totally disagree with its ideology. Al Qaeda has created antennas in Aceh, Indonesia, Pakistan with Lashkar al Taeba and deeper in the African desert lands like Niger, Somalia or Sudan, among others. Each terrorist cell follows its own radical ideas but accepts combining such efforts as a collective answer to Western imperialism.
Africa is definitely difficult to tame, if this refers, to eliminating poverty and wiping off terrorism. The chronic economic decline of the USA and Europe explains that lesser financial aid will flow to Africa. In turn, more black money will pour in corrupt governments and maintain the impending threat of terrorism.
A safe world
This 9/11 commemoration should not merely stand as a glorified tribute to all those who perished in the unforeseen tragedy. The images of two destroyer civilian planes blowing the Twin Towers will remain an indelible testimony of live terrorism broadcast globally. There are several lessons that have cropped ever since America, the superpower with “argile” feet crumbled under terrorism. Europe got also its share ; London followed by Madrid. In 2008, India suffered from hundreds of casualties and the scars remain difficult to erase.
A safe world remains a viable option with full support for democracy in Africa, broader access to education and the improvement of sanitation and physical infrastructure. Since 9/11, China has made inroads to Africa to quench its thirst for oil ; India has sent peace troops to maintain order in shaky regions of the Continent.
But poverty will breed infections like cholera and malaria, and ultimately terrorism. More than being a tenth anniversary for overwhelming compassion for Uncle Sam, Africa also needs consideration. All the woes of Sub-Saharan Africa remain so far unaddressed ; predictions get bleaker-a bit like a plagued Continent. This is where Africa stands when the sirens on D-day will call for self-confinement from all parts of the World. Poverty keeps breeding, alas !
Thursday, July 8, 2010
Société Civile et fondation économique
Société Civile et fondation économique
Demandez au citoyen de ce qu’il pense de son pays ces jours-ci. Il ne cessera de commenter les thèmes récurrents que sont la crise financière, le réchauffement de la planète ou encore la crise de la Zone Euro qui affecte l’activité des entreprises locales. Dans tous ces arguments, repose une seule chose – c’est que la fondation économique est devenue la base de tous les arguments qui animent les débats au niveau de la société mauricienne.
Si l’on compare nos perceptions d’aujourd’hui à ce qu’elles étaient trente ans de cela, la différence est palpable. Aujourd’hui, la fondation économique touche de près toutes les composantes de la société mauricienne alors que dans le passé, les arguments se limitaient au débat de salon, dit débat des privilégiés. Tout intervenant en dehors du cercle fermé était considéré comme néophyte, inapte à discuter des arguments comme l’offre et la demande qui se limitaient à l’intellectuel de l’économie.
Dans l’ensemble, cette société contemporaine qui maîtrise mieux les arguments économiques reste plus sensible et ouverte aux changements qui affectent son environnement. De nos jours, les décisions du gouvernement dont les arguments du Grand Argentier sont diversement critiqués par la société. Prenons, par exemple, le budget annuel qui suscite tant d’attentes et d’espoir de la société, il est correct de dire que le peuple mauricien comprend assez bien les enjeux du jour et s’accommode aux stratégies économiques formulées par le gouvernement. Auparavant, le budget national était considéré comme un gâteau qu’il fallait partager et ensuite s’attendre à des mesures peu populaires comme le temps des vaches maigres ou « serre ceinture ».
Aujourd’hui la fondation économique interpelle tous les acteurs de la société y compris ceux de la classe moyenne. La raison la plus simple qui explique cette attention liée à la matière économique est que cette société est bien plus évoluée qu’auparavant. En suivant comme bon élève à la télévision et dans les différents médias les discours du Grand Argentier et des économistes, la société est arrivée à cerner les débats sans trop de confusion. Dans le passé, il aurait été difficile d’expliquer comment une roupie forte, par exemple, pourrait bien affecter l’activité des entreprises locales vouées à l’exportation. Aujourd’hui, la société comprend mieux qu’une baisse de revenus due aux échanges peu préférentiels de l’Euro face à la roupie risque de jouer mal à l’économie. Aussi, une mesure de dévaluation pourrait également nuire à la bonne marche de l’économie.
Il a fallu alors penser que c’est l’éducation de la génération d’aujourd’hui a permis aux médias et décideurs économiques de mieux adresser leurs arguments face au peuple. Avec le temps, la société pourra elle-même voir si les arguments étaient logiques ou pas, ou encore réalistes ou trompeurs.
Les clichés du débat économique
Les clichés liés à la théorie économique se font de plus en plus visibles ces jours-ci. L’image que nous offre le secteur privé de par son « Joint Economic Council » se veut que ledit secteur favorise une roupie faible, voire des dévaluations ponctuelles, pour que les revenus restent rassurants pour eux et, bien entendu, pour l’économie. Les décideurs du secteur privé croient que le « monitoring » de la roupie, à elle seule, puisse garantir le maintien des emplois dans un secteur qui est également le plus grand pourvoyeur d’emplois dans cette économie de marché. En contrepartie, la société s’attend à la réplique gouvernementale qui est de mettre un frein à ces balbutiements en pensant qu’il est plus prudent de garder la roupie souple sans risque de dévaluation. Cette même société civile a déjà compris le risque des dévaluations de 1979 et 1981 où la roupie perdait sa valeur à 50% et contribua à mettre le pays à genoux bien que les décideurs de l’époque crurent à la parole d’évangile que l’assouplissement de la roupie sauverait l’économie dite moribonde.
La pression des médias et des forums
Ajoutons un peu de piment au sel, c’est un peu ce même débat économique que favorisent les médias. Parlons de l’expression, chassez le naturel, il revient au galop. Ainsi, une fois la clameur des législatives 2010 terminée, revoyons les décideurs du secteur privé rejoindre les couloirs de l’Hôtel du Gouvernement pour venir dire que l’économie patauge et que le pays est au bord du gouffre avec la crise de l’Euro. La société, peut être, réveillée de son sursaut, a compris l’ampleur de la crise et la tension que le débat économique puisse susciter. Ce débat-là existe dans la mémoire collective, hante la société jusqu'à la rendre indécise et parfois coupable quant à la crise financière qui secoue le monde et collatéralement l’Ile Maurice, à distance. Le gouvernement a su, dans ce cas précis, atténuer cette hantise en voulant adresser haut et fort que l’Euro c’est l’affaire des Européens et c’est à eux de se « démerder » car à Maurice, le travail se fait à l’accoutumée dans la discipline voulue. Aussi, en voulant préciser que la dévaluation n’est pas à l’ordre du jour, la société civile peut se permettre de respirer un tout petit peu, en disant que l’Etat providentiel protège l’intérêt du peuple.
Réplique et société soumise
Si ces prises de bec semblent rendre justice à la société qui subit ces arguments économiques en croyant qu’elle doit être aussi au centre du débat, on peut des fois croire, qu’elle ne reste pas tout le temps indemne. Voyons ce qui s’est passé ensuite. Un des interlocuteurs de secteur privé a trouvé qu’il était injuste de tirer directement contre le secteur privé et qu’il fallait adresser ce tir envers la crise elle-même. Soudainement, la société civile se voit griser par ces arguments qui frôlent la connotation communale. Ainsi, il est bon de souligner que certains titres de la presse ont trouvé juste de dire que le gouvernement réélu a répliqué à sa façon contre le secteur privé en voulant offrir un plateau à la société qui l’a fait élire.
Dans ces arguments qui ne cessent d’animer le débat au fil des jours et ce perpétuellement, c’est la société qui reste soumise. Les gens de la société civile sont éduqués, connaissent assez bien l’argument économique et réagissent logiquement aux répliques. Hélas, le débat penche souvent en leur défaveur. Par exemple, si le tir n’est pas rectifié, les pertes d’emploi seront grandes. Si la dévaluation ne se fait pas, les entreprises auront des caisses peu garnies et la société paiera de ces retombées.
Les syndicats et autres acteurs parleront un langage qui fera amadouer la société sans vraiment convaincre le citoyen moyen dit « common citizen ». Au milieu de tout ça, de tout ce débat, de tous ces flots d’arguments économiques, c’est la société qui paie les frais. Menace de perte d’empois, incertitude, tension et aussi un sens de culpabilité. Parfois, en utilisant la société civile comme pion ou paravent, on risque de la faire devenir un dindon de la farce et puis dire que ce peuple est admirable. Ô malheur, quand la fondation économique tire à boulets rouges contre cette même société civile dite éduquée !
Nirmal Kumar Betchoo
La MBC et sa dixième Coupe du Monde
Un événement dans un événement
La MBC et sa dixième Coupe du Monde
En cette période de fin de la Coupe du Monde, édition 2010, nombreux sont ceux qui se demandent laquelle des deux équipes finalistes, L’Espagne et La Hollande, remportera cette coupe. La majorité des Mauriciens regardent cet événement planétaire pendant un mois à la télévision en direct. Les soixante-quatre rencontres nous sont offertes par la télévision nationale, la MBC, par le biais d’une retransmission satellitaire; la « African Union Broadcasting », pour cette présente édition.
Le suspense prendra fin après les quatre-vingt dix minutes ou encore les prolongations et on verra brandir le trophée par un capitaine Européen. Cependant, la Coupe du Monde et la MBC célèbrent eux aussi une communion qui dure depuis trente-six ans déjà et le comble dans tout ça c’est la dixième édition de la Coupe du Monde télévisée continuellement depuis 1974.
En 1974, les rencontres de la Coupe du Monde seront diffusées pour la toute première fois à la télévision en direct. Le premier match opposera le tenant du trophée 1970, le Brésil face à la Pologne. Ce sera un match nul et les Mauriciens qui espéraient voir le roi Pelé à la télévision seront déçus. En effet, Pelé a déjà quitté le monde du football et ce sont ses collègues qui soutiennent encore la « Seleçao » auriverde dont les Paulo Cesar, Jairzhino, Claudolado, entre autres. La couleur n’existait pas à l’époque et on devinait les maillots des équipes de par les articles de presse citant la Hollande comme une équipe Orange. Sinon, pour faire bien vivre les matches, les équipes se distinguent par des contrastes, soit le blanc ou le noir.
1974 sera aussi l’année où la Coupe Fifa est présentée pour la toute première fois en remplacement du trophée Jules Rimet déjà réclamé par le Brésil. Organisé en Allemagne de l’Ouest (RFA), les Allemands partent favoris et atteindront la finale face à la Hollande. On retiendra des noms comme Frantz Beckenbauer, Johann Cruyjff, Gerd Müller, Paul Breitner, Johann Neeskens, Billy Bremner, Günter Netzer comme les grands bonhommes de ce premier Mondial télévisé à Maurice.
La finale sera de toute beauté et est diffusée vers les vingt heures rassemblant ainsi tous les mordus du ballon rond. L’animateur de plateau de l’époque est Alain l’Homme qui commente aussi, à la radio, les exploits de Strident et d’Epic, deux excellents chevaux, au Champ de Mars. Si la RFA remporte la finale, il y restera quand même beaucoup d’admirateurs et surtout des admiratrices très « yéyé »pour Johann Cruyjff, le long blond aux yeux bleus raconté par les présentateurs mais toujours vu en noir et blanc.
L’après 1974
Cette association de la MBC et la Coupe du Monde se poursuivra de façon continue. En 1978, la télévision est bien armée pour accueillir le Mondial organisé en Argentine. On entend les noms comme Mar del Plata et River Plate, comme stades et joyaux de l’Argentine. Là, les Kempes, Ardiles, Passarella se mesureront face à la Hollande qui prétend que cette fois ci, on jouera « sans les femmes ». Cependant, les Argentins sont tellement bons qu’ils remporteront le tournoi pour la toute première fois.
En 1982, année du premier 60-0, Jean Roland Delaître, premier directeur de la MBC depuis l’Indépendance, offre aux téléspectateurs le premier cadeau 100% foot avant son départ. Les cinquante-deux rencontres sont offertes en direct avec une première participation de vingt-quatre équipes. L’Afrique, très absente de cette compétition, s’offre aussi un beau palmarès. Le Cameroun passe le premier tour sans défaite mais quitte le tournoi avec son gardien « marabout », Joseph Nkono.
Entre ces événements majeurs, les lecteurs du « Mauricien » suivent le coverage du Mondial par « Week-End Sports Magazine », le seul hebdomadaire sportif du pays qui est publié chaque mercredi. De temps à autre, ce journal nous offre des posters des équipes en noir et blanc.
La télé privée et le Mondial
La télévision nationale poursuivra ses efforts et se verra confronter pour la toute première fois par la télévision privée en 1998 au temps où la France organise son Mondial. C’est aussi le moment où le monopole de la télédiffusion prend fin car ce sont les Français de « Canal + » avec le regretté Thierry Gillardi et Jean-Michel Larqué qui offrent aussi des prestations fort remarquables. Toutefois, les chaînes privées sont à leurs premiers balbutiements et n’ont que dix mille abonnés par rapport à la masse critique qui reste fidèle à la MBC.
En 2005, le gouvernement élu poursuit sa politique de développement télévisuel et propose la télé numérique terrestre (TNT). En 2006, pour la première fois, les Mauriciens abonnés à la télévision publique s’offrent le luxe de voir le Mondial « Made in Germany », cette fois réunie, en qualité numérique. Les images sont meilleures que celles de l’analogue et les interférences hertziennes se font rares.
Cette année–ci la télévision nationale est restée fidèle à son habitude en offrant la quasi-totalité des matches en direct. Cependant, la technologie télévisuelle pousse un autre pion qu’est l’image de haute définition offerte par « Canal + » et « Parabole Maurice » avec son partenaire DSTV.
Le Mondial, un brin de philosophie
Au milieu de toute cette brève chronologie, nous retiendrons quelques faits saillants. Comme par exemple, les Mauriciens découvriront Maradona et sa fameuse main de Dieu en 1986, la danse de Roger Milla du Cameroun en 1990, les petits pas très discrets mais décisifs de Paolo Rossi en 1982, l’initiation des Américains au « football soccer » en 1994, la Coupe du Monde jouée dans deux pays, le Japon et la Corée du Sud en 2002, les pleurs de Maradona en 1990 après la défaite de son équipe face à l’Allemagne, la tête de Zinedine Zidane en 2006 et, finalement, une pieuvre qui fait des pronostics très mesurés en cette édition 2010.
Ainsi, ça fait bien dix Coupes du Monde en direct depuis trente-six ans. Que reste-t-il comme plus beau souvenir si ce n’est que le « Kaiser » Beckenbauer qui brandit le trophée FIFA que nous regardions en noir et blanc, une froide soirée des années 70, tantôt assis sur une natte tantôt debout pour applaudir en famille très nombreuse. En cette dixième édition, la Hollande revient sans l’Allemagne. Parfois, ce n’est pas très modeste de dire merci à la télévision nationale pour sa dixième édition de la Coupe du Monde et, souhaitons que cet amour du foot total dure ! Peut être en haute définition la prochaine fois sans trop déroger la suprématie des images noir et blanc qui ne s’évanouiront jamais.
Nirmal Kumar BETCHOO
40 ans de Socialisme, Un certain regard
40 ans de Socialisme, Un certain regard
En cette période électorale, tous les partis politiques défendront leur manifeste électoral sous le signe d’équité, de justice sociale ou encore de démocratisation de l’économie. Ces élans sont typiques d’un socialisme que tout politique veut dévoiler à son électorat dans le but de lui plaire et de lui faire ensuite confiance en terme de votes qu’il espère récolter lors des suffrages.
Le Socialisme a existé depuis fort longtemps à Maurice bien que notre génération reconnaît mieux celui de la période post-indépendance où le pays sortait de l’emprise coloniale britannique. Si l’on comptabilise cette période-là, nous sommes bel et bien au quarantième printemps du socialisme dit nouveau ou moderne.
Le véritable départ du Socialisme nouveau fut celui que les militants d’époque appelèrent « les années de braise ». Issus des milieux éduqués et donc intellectuels, ces jeunes-là furent les premiers à manifester leur idéal social envers la société après avoir témoigné Mai 68 et le printemps de Prague comme points de repère pour un monde différent. Haranguant tantôt la fin des abus de pouvoir envers les travailleurs du port et de l’industrie sucrière, tantôt protestant auprès des ambassades pour montrer leur opposition à la présence des « Yankees » au Vietnam, ces premiers balbutiements socialistes et marxistes eurent un effet surprenant au niveau de la classe moyenne et ceux au bas de l’échelle de la société.
L’idée première de ce socialisme des années 70 fut d’éliminer la disparité entre les races pour en faire une lutte des classes, donc une ouverture vers la société dans un contexte où le pays méritait un sort économique plus favorable, après avoir été laissé à son compte par les colonisateurs anglais.
Ce vent de socialisme balaya dans toute sa ferveur l’imagination de la classe moyenne pour se faire ensuite accepter par les bourgeois qui, eux, s’obstinèrent à accepter qu’ils soient responsables d’une société injuste. Ce Socialisme ambiant, d’abord vivement accepté par la classe syndicale et politicienne de gauche, devint par la suite un modèle de justice sociale que la classe moyenne prit pour acquis.
En ces temps-là, le Socialisme nouveau eut, pour projet, de dessiner une société avant-gardiste avec l’adoption de la culture mauricienne comme édifice capable d’inventer la société plurielle de demain. La vie politique du début des années 80 s’illustra de cette façon où les nouveaux gouvernants adoptèrent un style plus décontracté auprès du colonialisme qui s’estompait à vue d’œil. S’illustrant par la traduction de l’hymne national en « Kreol » puis les infos et d’autres émissions en langue mauricienne, ce Socialisme dopa nos pensées en un pays qui pourrait enfin faire gerber les semences d’un mauricianisme longtemps annoncé comme vecteur d’unité nationale.
Le Socialisme reçut son camouflet lors de la cassure gouvernementale en 1983 et laissa ses plumes au retour inattendu du capitalisme, ce modèle qui consistait à diviser le monde en deux blocs, créer des différences entre gouvernants et subordonnés ou encore laisser foisonner la richesse parmi les quelques uns les mieux lotis de la société.
Ce Capitalisme-là, toutefois, ne fut pas rejeté ni vilipendé par les Socialistes et la majorité des Mauriciens. Ayant compris qu’une orientation industrielle transformerait le pays en chantier dans les jours à venir, le système capitaliste, embaumé d’un socialisme supposément égalitaire, eut pour effet de dissuader le peuple contre la faiblesse du marxisme qui n’apportait guère grande chose aux gens au bas de l’échelle. Une situation de plein-emploi au cours du boom économique de 1986 développait alors des instincts d’économie, d’épargne pour ensuite laisser le champ libre à la consommation.
Graduellement, le monde changea de cap. La fin de la guerre froide illustrée par la chute du mur de Berlin, dit mur de la honte, et de l’éclatement des états Soviétiques, ébranla soudainement l’édifice socialiste qui se lassait pourtant perdurer. La fin du Communisme dans l’ex-Union Soviétique eut un retentissement formidable à l’échelle mondiale. Le Socialisme commença graduellement à faire les frais. De part le monde, le Capitalisme reprit sa place et même sa notoriété auprès des dirigeants et même des sceptiques. Le retour du « Labour » en Angleterre avec Tony Blair en 1995, la fin du règne socialiste France sous la cohabitation Jospin-Chirac et le rapprochement des pays de l’Europe de L’Est restent ici quelques témoignages du regain du Capitalisme vers le milieu des années 90.
Entre-temps, dans l’univers mauricien, l’idéologie Socialiste des années 70 commença à s’essouffler. Le dynamisme du marché tournant autour de l’offre et de la demande commença à mieux rétribuer la richesse aux soi-disant méritants. Le rapport du PRB, par exemple, reste une stratégie visant à rectifier le fossé amenuisé par la compensation favorable offerte à la classe moyenne aux cours des compensations ponctuelles. Tout cela a l’ambition de primer ceux qui cherchent plus de confort matériel bien entendu suivi des années d’études et de formation professionnelle. Au fait, c’est le concept de la culture d’entreprise qui favorisa le « people capitalism » où les cadres moyens s’offrirent le luxe de s’identifier comme les nouveaux riches.
En parallèle, le marketing au niveau de la consommation a fait des ravages. Du supermarché caractérisé par des caddies dans les villages allant jusqu’à l’emplacement très chic des hypermarchés jouxtant les zones urbaines, la consommation avec un goût poussé pour le luxe et la qualité, a soudainement mis au rancart cette société qui, jadis épousait le Socialisme.
L’arrivée de l’informatique a aussi joué un rôle prépondérant en minimisant la valeur de l’idéologie Socialiste. Si la Chine Communiste était vue comme l’un des derniers remparts d’un Socialisme contrôlé par l’état, les médias dont l’Internet ont, par la suite, fait de ce pays, une vitrine du commerce international dans le sens pur du mercantilisme. L’Inde qui militait pour le Socialisme sous le régime éphémère de Morarji Desai dans les années 70 est elle aussi mieux vue et appréciée de par ses grands projets fonciers et sa vitrine « bollywoodienne » qui jette des millions pour faire déferler le côté « jet-set » et très branché de l’Inde nouveau-le Shining India et ses projets d’avenir, faisant de cette démocratie, un symbole de Capitalisme nouveau qui lui permet de sortir de son sous-développement.
Alors, dirions-nous que le Socialisme est bien et bien enterré! Que l’idéologie des « seventies » avec ses jeunes délurés aux cheveux longs et bouclés colorés comme des perroquets a disparu ! Et dire aussi que ses lieutenants ou suiveurs sont devenus des ermites avec le temps, se laissant bercer, par nostalgie, par des pensées qui leur étaient chères.
Quelque part, le vent du Socialisme a soufflé. L’économie mondiale vient de trembler dans ce nouveau millénaire, donc quatrième décennie du Socialisme nouveau, sous une crise financière digne d’un tremblement qui n’a laissé aucune chance aux géants aux pieds d’argile. Initialement secouant les USA, la crise s’est échelonnée d’une façon collatérale sur les pays développés pour ensuite rallier le monde. Les gouvernants se sont soudainement trouvés face à une crise complexe à gérer où il fallait, avant tout, rassurer leurs populations que l’intervention d’Etat sur les marchés serait la seule chose la plus souhaitée par le peuple au lieu de croire en le redressement systémique des marchés.
Les « Stimulus Packages » offerts sous forme de liquidités aux entreprises a démontré que l’Etat Providence n’est pas un système morbide et que l’offre et la demande, deux poids de la balance du marché peuvent parfois monter leurs limitations. Avec six millions de chômeurs aux USA suivi de la chute des multinationales les plus performantes au cours du siècle dernier, le Socialisme refait surface sous une autre forme comme une lueur d’espoir qui fut souvent cachée derrière cet écran très opaque que fut ce Capitalisme libéral, tantôt critiqué par sa cruauté et tantôt flatté par sa capacité d’offrir la richesse aux plus méritants.
Le souffle du Socialisme du temps « margoze » et des « années de braise » ne s’entend plus. Désormais, on s’interroge sur le rôle interventionniste et paternel de l’Etat dans les pays où la situation prend du temps pour se décanter. Comme nous dit le paradigme, le socialisme s’invente au gré et à le mesure du temps. Propulsant à l’avant ses idéaux de démocratie, d’égalité et de justice sociale, il reste un système respecté même si ses limites ont été bien souvent décriées. En quatre décennies, le Socialisme pur et dur reste là un peu comme une eau qui tranquille parfois teintée de quelques clapotis, loin des braises qui peuvent le chatouiller, un peu comme le temps qui passe et laisse des souvenirs.
Nirmal Kumar BETCHOO